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Camin de vida # Espaliu
Introduction
Dans son Camin de vida, Eliane évoque Joseph Vaylet (1894-1982) :
« Joseph Vaylet était de la génération d’Henri Mouly et de Calelhou, celle des fondateurs du Grelh roergàs, qui se reliaient encore directement à Bessou. J. Vaylet avait même le privilège d’avoir échangé avec le restaurateur de nos lettres d’oc quelques lettres… Comment le lien peut-il se faire entre un petit paysan du Mas Nouvel (Saint-Geniez d’Olt), né le 12 novembre 1894, et l’équipe qui allait livrer bataille avec fougue et générosité pour l’honneur de sa culture ? Le collège d’Espalion, où il fit ses études, découvrit La Poésie des bêtes de Fabié, vit et écouta Bessou et écrivit ses premiers vers, eut certainement un rôle déterminant. Mais le mouvement essentiel est bien celui qui fut propre à Vaylet : ses dons, sa facilité, sa fantaisie qui allaient l’entraîner par des zigzags, mais qui paradoxalement ont sans doute nui à l’œuvre écrite qu’il a composée, tant celui qui s’était surnommé « lou Parpailhol » a longtemps semblé fasciné par l’instant. Dès 1919, au lendemain d’une guerre où se sont mêlées escapades et blessures, il est lauréat d’un concours littéraire et désormais il se fera une véritable spécialité des concours, des Jeux floraux, recueillant des médailles, des fleurs et des prix, jusqu’à l’âge de 82 ans ! Si les concours convenaient à son inspiration artistique et à ses Flors, courts poèmes dont il fera plus tard un recueil (Flors d’Aubrac, 1974), ils lui apportaient les satisfactions d’une approbation et d’une reconnaissance. Dire cela, c’est évoquer le Vaylet comédien aimant le contact avec le public, montant sur les tréteaux, prenant d’assaut le monument de Jean-Henri Fabre, à Saint-Léons, devant lequel on avait prévu les savants et non les poètes d’oc (1924) ; c’est évoquer les groupes folkloriques qu’il a créés et animés comme Les Troubadours, Le Rebiscol et La Cabrette du Haut-Rouergue (1959), les passages mémorables à la radio, l’enregistrement d’un disque, l’aventure espagnole… C’est évoquer aussi ce musée qui est son œuvre majeure, et où l’on allait souvent et surtout pour lui. Mais ce goût de la scène s’alliait de façon complexe à une sorte de naïveté et parfois à de la gaucherie et à un certain désordre qui faisaient partie de son charme, et qui donnaient l’impression à celui qui l’abordait d’être le premier à découvrir ses richesses intellectuelles ou matérielles. Les correspondances et les visites ininterrompues, à Espalion, montrent que beaucoup succombaient à ce charme.
Il faut relire dans En tutant lo grelh les pages de Mouly qui relatent la fondation du Grelh roergàs en mars 1921. A partir de ce moment, Vaylet est tout acquis à la défense des lettres d’oc et de la civilisation méridionale… ce qui ne l’empêche pas de suivre les muses françaises. Il milite au sein du félibrige, devient sous-syndic de la Maintenance de Languedoc et est élu, en mai 1955, majoral du Félibrige, titulaire de la cigale de l’Orb, portée avant lui par un Rouergat, l’abbé Lafeuille, curé de Clairvaux. Ce n’est qu’assez tard, à partir des années 60, qu’il se lance véritablement dans la publication d’écrits dont ses armoires sont encore pleines, en français et en langue d’oc : Hommage à Durand-Picorat (préparé avec Jean Boudou), Sept contes de Noël (1969), Heures ferventes (1972), Flors d’Aubrac (1974), Presics de l’Abat Badaruca (1976), Le Jornal d’une pastra (1979), Set estelas al cèl roergas (1979), etc.
En tête de Flors d’Aubrac, Georges Girard a parfaitement dépeint les nombreuses facettes de l’écrivain tour à tour moqueur et gaulois, paysan, amical, gourmand ou galant…
Parmi tous ces visages, un des plus originaux est celui du Vaylet gaulois, aux deux sens du mot : gaulois, charnellement attaché à sa terre, tourné vers le Massif central et au-delà vers les terres océaniques, membre et même « druide » du collège bardique des Gaules, chantre de la terre et de l’eau, bâtisseur de « dolmen » (!) ; mais gaulois aussi au rire truculent et penaud à la fois, aux publications rabelaisiennes, dont la principale est Proverbes et dictons rabelaisiens (1975-1982), gaulois aux explications insolites et cocasses, aux blagues les plus grosses qui faisaient la joie des visiteurs d’Espalion, poète de l’ail et du poivre…
Joseph Vaylet ne se laissera pas saisir en quelques mots. Sait-on qu’après avoir acheté le greffe du tribunal de commerce de Saint-Geniez en 1921 (il en a écrit l’histoire), le petit paysan devint comptable, marchand de graines et même valet au château de Lugans, avide de mouvements et d’expériences ? Sait-on qu’il fut conseiller municipal à Saint-Geniez d’Olt et, qu’après la guerre de 1939-44, alors que le transfert du tribunal de commerce (en 1924) l’avait bien établi à Espalion, il fut candidat aux élections municipales dans cette ville ? Se souvient-on qu’il fonda ou géra des journaux comme L’Ohuc (le cri gaulois de la Montagne) ou Le Petit Aveyronnais, qu’il se dévoua pendant la dernière guerre pour donner des spectacles au profit des prisonniers ?
L’idée de son musée remonte aux fêtes celtiques et régionalistes d’Espalion en 1937, à l’occasion desquelles, il avait présenté une exposition au palais de justice. Elle prit corps en 1940 avec un appel par voie de presse et aboutit en 1954 à l’inauguration d’un premier musée puis en 1959 à celle d’un second dans le vieil hôtel de Bernardin de la Valette, devenu le siège de la Caisse d’épargne, et enfin en 1976 à l’ouverture du musée que tout le monde connaît désormais au rez-de-chaussée de l’ancienne église Saint-Jean, au centre même d’Espalion. Cette création, qui sera son œuvre la plus populaire et la plus durable, porte la marque de son intuition si précoce, de son amour de son pays, de son attachement à tous les aspects, y compris les plus secrets, de l’âme rouergate. Dès 1967, il a eu la sagesse pour
assurer la pérennité de son œuvre de créer l’Association musée-bibliothèque Joseph Vaylet et il trouve l’équipe passionnée qui saura s’y dévouer, derrière M. Emile Cabanettes, puis avec M. Cabrolié. Des expositions se succèdent : depuis sa riche collection de bénitiers, jusqu’aux inventions de Rouquayrol et Denayrouze, en passant par les madones de la Vallée d’Olt, les reliquaires, les poteries… Grâce à J. Vaylet et à son équipe, Espalion est devenu un des centres culturels qui comptent désormais. Qu’il soit permis au conservateur du Musée du Rouergue de rappeler l’action commune entreprise par les deux musées à partir de la Charte culturelle en 1978. Tout ce qui s’est fait n’aurait pu être entrepris sans le levain qu’il a mis dans la pâte.
Il y eut la reconnaissance officielle en 1978 avec la Légion d’honneur. Il y a l’attachement et la ferveur de ses concitoyens, si manifeste et si touchante, au lendemain de sa mort, le 19 décembre 1982. » (Jean Delmas, texte publié dans la Revue du Rouergue, 1982 ; Marie-Paule Grégoire, Joseph Vaylet, majoral du Félibrige, 1981)
-- Operacion PAÍS Comtal/Òlt/Truèire 2022 / Espaliu --
Testimoniatges, tròces de vida, istòrias, saupre-far... En 2022, la còla de l'Institut occitan d'Avairon s'es passejada sul territòri que va de La Lobièira a Sent-Ipòli (21 comunas) al rescontre de mai de 240 locutors occitans.
Vidéo
Eliane MOISSET
née BOUSQUET en 1952 à Verrières de Sébrazac. D'Espalion.