Portail (portal) couvert d'entrée de cour de la maison (ostal) où résida le forgeron (fabre) Jean Tranier, partisan de l'anti-pape Benoît XIII, au Coulet

J'apporte des précisions ou
je demande la traduction >

Introduction

Portail (portal) couvert d'entrée de cour de la maison (ostal) où résida le forgeron (fabre) Jean Tranier, partisan de l'anti-pape Benoît XIII, au Coulet

Le Coulet

« Au XVe siècle, y résidait le forgeron Jean Trahinier, un des derniers partisans de l'antipape Benoit XIII. Il fut arrêté avec sa famille en 1467. » (Jean Delmas, 1994)

"On ne peut comprendre l'histoire de Pierre Tranier ou Tragnier, sans un retour rapide à l'histoire du Grand Schisme d'Occident, survenue après la mort du pape Grégoire XI, dernier pape d'Avignon, en 1378. la pression, les cardinaux font l'éloge de Urban Rome VI. Mais le «parti français» choisit Clément VII (Avignon). Le christianisme et l'Europe étaient divisés. Afin de diviser les deux papes qui auraient été légitimement élus, on a pensé à l'arbitrage d'un Conseil. Clément VII mourut, mais ses partisans raidirent Pedro de Luna, sous le nom de Benoît XIII (1394). La réunion du conseil à Pise en 1409 décida de laisser tomber les deux papes et choisit un nouvel homme: Alexandre V. Mais les deux papes refusèrent au Conseil toute autorité sur eux et s'excommuniant excommunièrent le Conseil. Nous étions avec trois papes. Alexandre V est décédé peu de temps après. Les cardinaux l'ont remplacé par Jean XXIII. Ce dernier convoque un nouveau concile à Constance (1414) en présence de représentants de toute la chrétienté. Le Conseil a proclamé sa supériorité sur le pape. À sa demande, Jean XXIII a abdiqué; Grégoire XII successeur d'Urban XI, "le Pape de Rome" a fait de même. Mais Benoît XIII, «le pape d'Avignon», affirmant sa légitimité, a refusé. Le Concile a élu le Pape en 1417 Martin V, qui a repris les rênes de l'Église et a mis fin au Concile. Benoît XIII est décédé vers 1422. Le grand schisme était presque terminé.

Si l'antipape Benoît XIII (Pedro de Luna) avait tenu si longtemps, contre presque tout le monde, il le devait à la force de son caractère, mais aussi au soutien de certains princes et notamment de l'Armagnac, comte de Rodez. C'était un homme bien informé, subtil, habile et vertueux, qui semblait très convaincu de sa légitimité ou de son entêtement, selon qu'il était de son côté ou de son adversaire. Il avait été élu «pape» en 1394, à la mort de Clément VII, à la condition qu'il aurait le premier but de la paix de l'Église et qu'il se retirerait si nécessaire. Il s'y était engagé. Mais une fois investi de la charge suprême, il a refusé toute démission. En raison de son entêtement, il fut progressivement abandonné par les princes, qui cependant ne négligèrent aucune approche diplomatique avec lui et se réfugièrent à Peniscola, sur la côte près de Valence, où il refusa désormais toute composition. Le soutien le plus fidèle de Benoît XIII a été le connétable Bernard d'Armagnac, comte de Rodez (1415-1418), et sa famille. En France, le conflit entre Armagnacs et Bourguignons complique encore la division religieuse du prolongement politique.

Un des plus zélés partisans de Benoit XIII était le Rouergat Jean Carrier, archidiacre de Saint-Antonin, chanoine de la cathédrale de Rodez. Il était devenu son vicaire général dans les Etats du comte d'Armagnac. Déclaré schismatique, il se réfugia dans le château de Tourène (commune de Crespin), dans les gorges du Viaur. Ce refuge fut surnommé par dérision Peniscolette. Benoit XIII remercia Carrier de sa fidélité en le créant “cardinal” ou si l'on préfère “anti-cardinal”. A la mort de Benoit XIII, Carrier décréta qu'il formait à lui tout seul le sacré-collège et il élut secrètement un compatriote qui n'aurait été que Bernard Garnier, sacriste de Rodez et qui prit le nom de Benoit XIV. Le parti schismatique se défaisait complètement. Mais Carrier tenait bon, avec l'appui du Comte d'Armagnac. Il fut pris à Puylaurens en 1433 et mourut peu de temps après dans les prisons du château de Foix.

C'est là que nous trouvons le Tranier. Dans le Coulet, près de Montou, et non loin de Tourène, vivait le forgeron Jean Tranier et sa famille. Partisan de l'antipape Benoît XIII, Tranier n'est pas allé à l'église de Montou, dont le prêtre a reconnu Martin V, mais à Cadoulette ou Murat où se trouvaient des prêtres de son parti: Jean Moysset, Guilhem Noalhac de Jouqueviel et Jean Feral ou Farald. Il se moquait du pape Martin V en criant  "Arri, Marti!" A la mort de Benoît XIII, le Tranier, à la suite de Carrier, reconnaît Benoît XIV. Ce dernier a nommé Jean Feral Cardinal ... qui, à la mort de Benoît XIV, a élu, à son tour, Jean Carrier Pape. Pierre, fils de Jean Tranier, a été arrêté et placé dans les prisons de Najac pendant un certain temps (vers 1446). Mais il a abjuré ses convictions, a été libéré, a retrouvé les siennes et, selon la terrible expression de ses juges "tanquam canis ad vomitum redeundo" (revenant en tant que chien à ses vomissements), il est ensuite retourné au parti de Carrier. Les Traniers ont décidé d'aller sous terre, préférant, comme ils le diront plus tard, perdre leurs biens, mais pour sauver leur âme. Jean et ses enfants, Pierre, Jean-Baptiste et Jeanne, ont gagné les gorges sauvages du Viaur, se cachant désormais dans les grottes et dans les bois, se déplaçant la nuit, suivant les chemins les plus détournés. Ils ont passé un an à Pont-Courbe, trois ans au moulin de Bédène, près du Pont des Infournats, 15 mois au Moulin de la Soulayrie. Des voisins les hébergeaient et leur fournissaient de la nourriture en échange de divers emplois. Le cardinal Jean Feral, leur compatriote, leur a donné les sacrements. Une nuit, dans le bois de Boscvert, près de Roquebilière, à côté des Infournats, il les a avoués et leur a donné la communion avec deux hôtes, qu'il avait cachés entre les pages d'un livre, pour ne pas attirer l'attention. 

On finit par arrêter les indomptables Tranier au moulin de la Soulayrie, en 1467, sauf Jean-Baptiste, qui était peut-être mort entre temps. Ils durent s'expliquer à Rodez, place du Marché-Neuf (aujourd'hui de la Cité), devant l'Official de Rodez : pour eux, l'église légitime était celle de Jean Carrier ; celui-ci procédait du seul pape légitime Benoit XIII ; le concile n'était pas supérieur au Pape ; il n'avait pas à se soumettre à lui... Quand on lit le procès-verbal du jugement, on est surpris des connaissances de ces hommes, qui avaient vécu pendant vingt années comme des parias, de la qualité de leurs réponses et de la logique de leur raisonnement. Il se considéraient comme les vrais catholiques, rejetant tout compromis avec “l'église maligne” (Ecclesia maligna)... Ils étaient peu nombreux ; mais ce n'est pas le nombre qui faisait la vérité. Leur pape était désormais clandestin. Mais selon une prophétie, le roi de France saurait le découvrir et il le rétablirait sur son trône...

Jean Tranier, que l'on appelait “Lo fabre del Colet” et surnommait “Le prophète Elie”, mourut pendant le procès, sans se rétracter. Il avait environ 60 ans. Ses enfants Pierre et Jeanne convaincus de schisme et d'hérésie furent condamnés à l'exposition publique. Pierre Tranier, âgé de 40 ans, en appela au roi de France. Jeanne, âgée de 35 ans, abjura et fut condamnée à la prison perpétuelle. Ainsi disparut le dernier carré des fidèles de la Petite Eglise du Viaur. » (Texte de Jean Delmas d'après l'article de Noël Valois “La prolongation du Grand Schisme d'Occident au XVe siècle dans le Midi de la France” publié en 1899 dans le tome 36 de l'Annuaire-bulletin de la société de l'histoire de France et de Marius Constans “Le Grand Schisme d'Occident et sa répercussion dans le Rouergue”, publié en 1916 dans le tome 16 des Mémoires de la Sociéte des lettres, sciences et arts de l'Aveyron)

Lo Colet, commune de La Salvetat

Photo

Portail (portal) couvert d'entrée de cour de la maison (ostal) où résida le forgeron (fabre) Jean Tranier, partisan de l'anti-pape Benoît XIII, au Coulet
© PASCAL Jacques (Montrozier, Rodez)

Localisation

Vous aimerez aussi...

En cours de chargement...