Lo meu pepin dins la luna

Collecté en 2014 Sur les Communes de Castelmary, Crespin Voir sur la carte
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Introduction

« Un còp èra, lo Bon Dieu plantèt una vinha sus la Tèrra, dins mon país, a Ròcaguda. Desfonsèt un travèrs, lo foguèt, bastiguèt de paredons. Trimava coma un galerian de sus las galèras. Rebalèt de fems dins la cartoira. Per se provesir de planton, ne venguèt cercar a cò del meu pepin d'alara que, el tanben, aviá una vinha a Ròcaguda... »

Ce conte figure dans le recueil des Contes del meu ostal de Jean Boudou (1920-1975), publié en 1951 chez Salingardes à Villefranche-de-Rouergue.

 “Lo meu pepin dins la luna” est ici interprété par Jérôme Vialaret, contaire.

Enregistré à Lavernhe de Castelmary le 6 mars 2014 dans le cadre d'un stage organisé par l'Ostal Joan Bodon.

Coproduction de l'Ostal Joan-Bodon et de l'association Raiças.

LE 11 DECEMBRE 1920, JEAN BOUDOU

Le 11 décembre 1920, il y a tout juste cent ans, naissait Jean BOUDOU dans la maison familiale de Crespin, en Ségala aveyronnais. Souvent présenté comme un écrivain « occitan » - s'il a assuré lui-même la traduction de certaines de ses œuvres et écrit de nombreuses contributions en français, c'est sa langue maternelle, la lenga de l'ostal, qui inspirera toute sa vie ses enfantements littéraires -, Jean BOUDOU est, d'abord et avant tout, un écrivain majeur. En 2010, aboutissement du projet porté par André AT, maire de Crespin, et Josiane et Robert MARTY, était inauguré dans sa maison natale un espace dédié à sa présentation, à la connaissance de son œuvre et, à travers elle, à la langue et la culture occitanes qui lui ont été si chères : l'Ostal.

Poète, romancier, Jean BOUDOU laisse une œuvre profonde où l'inquiétude et les ferments d'espoir semblent se confronter, s'évaluer sans cesse, sans affrontement ni vainqueur. Jean BOUDOU n'embellit rien, n'extrapole jamais, n'idéalise pas. Témoin, à la fois, des rigueurs de son temps, des pertes irrémédiables et de la nature humaine, éternelle et fragile, il évoque ce qu'il voit, parle de ce qu'il ressent, décrit ce qu'il connaît.

L'oeuvre, émaillée d'étreintes, d'heures joyeuses et de camaraderies, ne convoque jamais le bonheur. La vie ne l'a guère pour objectif, et l'humain y apparaît inapte. En mots simples, phrases courtes et imagées, en conteur qu'il n'a cessé d'être, Jean BOUDOU peint l'homme tel qu'il est : solitaire, tourmenté, emporté par des événements qui le dépassent auxquels il s'adapte tant bien que mal, subissant une vie qui lui échappe. Digne, néanmoins, dans son aspiration à l'être et sa conscience désabusée ; grand, au cœur de ses propres misères. Le grand-père de Catoïe lui fait entrevoir le miracle de la vie humble et quotidienne, presque inaperçue, sous la forme de la pâquerette piétinée par les bœufs, « engluée de bouse », relevant encore la tête et s'ouvrant au soleil, s'épanouissant encore, s'épanouissant toujours, « jusqu'à la fin ». Et l'homme du Livre des Grands Jours, aux dernières lignes du livre, marche vers sa mort inéluctable en chantant « pour tenir, ne plus penser à rien », et ne pas s'effondrer. Grandeurs et servitudes, les deux étroitement mêlées, la vie des petits, des invisibles, des sans-voix, dans leur humanité émouvante et tragique, aura fécondé toute son œuvre.

L'année 2020, année du centenaire, avait été pensée comme celle des commémorations. La crise sanitaire n'a pas permis que les étapes s'en déroulent comme il était prévu, même si l'équipe de l'Ostal a fait le maximum pour assurer ce qui était possible, et pallier les déceptions. L'année qui s'ouvre permettra, nous l'espérons, de réparer celle qui s'achève, rendez-vous d'ores et déjà pris. Mais sur celle-ci, précisément, qui ne voit combien Jean BOUDOU aurait porté un regard aiguisé, s'en inquiétant sans doute, s'en inspirant sûrement ? Jean BOUDOU dont toute l'œuvre évoque nos enfermements, « confinements » de tous ordres, volontaires ou imposés, sociaux, familiaux, religieux, sectaires, pathologiques, politiques... qui nous compriment, nous racornissent, forment et ferment notre horizon. Faisant de nous ce que nous sommes, et nous en éloignant.

Hasard du calendrier, l'année même du centenaire de sa naissance, dans son actualité brutale, nous invite ainsi à reprendre son œuvre, à rouvrir ses livres, à nous y plonger à nouveau. Sa voix, qui s'est tue il y a aujourd'hui quarante-cinq ans, nous y parlera de nous toutes et tous, frères et sœurs humains universels, faisant crisser sous nos pas maladroits les cailloux d'un chemin que nous n'avons pas choisi mais qui seul vaut, parce qu'il n'en est pas d'autre.

Et qu'il faut aimer.

Malgré tout.

Jérôme Vialaret, président de l'Ostal Joan BODON

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Jérôme VIALARET

né en 1965 à Albi (81).

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